"Des informations inexactes et peu fiables sur la nature du changement climatique sont largement diffusées auprès du public et des décideurs politiques, ce qui entrave et retarde l'action en faveur du climat", explique le Panel international sur l’information et l’environnement (IPIE) dans son premier rapport, publié ce mois-ci.
Organisation indépendante spécialisée dans l’étude de l’information dans le monde, l’IPIE a étudié plus de 300 études, parues ces 10 dernières années. Ses travaux ont démontré que des "acteurs puissants, incluant des entreprises, des gouvernements et des partis politiques" partageaient délibérément de fausses informations concernant le changement climatique.
Les entreprises d’énergies fossiles en première ligne
Le rapport détaille précisément quelles instances sont les plus à même de partager de la désinformation climatique. En tête de ligne se trouvent les entreprises spécialisées dans les énergies fossiles. Ces dernières déploient des moyens importants depuis les années 1980 pour "nier la réalité du changement climatique, occulter leur propre responsabilité et faire obstacle aux mesures d'atténuation ou les retarder".
C’est aussi le cas des mouvements d’extrême droite, en Europe et aux États-Unis. Des partis comme l’AfD en Allemagne, Vox en Espagne ou le Rassemblement national en France sont cités comme "contrevenant activement à la science du climat".
De l’autre côté de l’Atlantique, Donald Trump, connu pour encourager fermement l’utilisation des énergies fossiles et pour avoir assimilé le réchauffement climatique à "un canular", est identifié comme un élément clé de la désinformation climatique.
"Ses sophismes logiques, affirmations infondées et conclusions tronquées ont été fortement retweetés par d'autres utilisateurs", détaille une étude reprise par les auteurs du rapport. Une autre note que la rhétorique du président étatsunien suggère qu’il n’est pas un cas exceptionnel et qu’il "pourrait être considéré comme un exemple marquant d'un problème plus large dans lequel des personnalités politiques ayant des opinions contraires au climat sont élues à des postes de premier plan".
Certains de ces discours sont aussi repris par les médias, participant à relayer ces opinions en les faisant passer pour des informations. En avril dernier, 128 cas de désinformation à propos du changement climatique avaient été relevés dans les médias français depuis le 1er janvier, dont la moitié sur CNews et Sud Radio.
Le recours au greenwashing
Si le déni pur et simple de la réalité scientifique est encore très répandu, d’autres formes de désinformation se développent au sujet du climat. L’étude relève plusieurs théories complotistes largement répandues sur Internet ou encore l'utilisation du greenwashing.
Pour aller plus loin : Eva Morel : "la désinformation ne cesse de croître dans les médias, plus particulièrement sur les questions climatiques"
Elle cite notamment l’entreprise pétrolière TotalEnergies, "qui se présente, par le biais d'activités publicitaires, comme respectueuse de l'environnement, alors qu'elle se livre en réalité à des pratiques nuisibles à l'environnement". Il y a un mois, la société faisait face à la justice après avoir été attaquée par 3 ONG de défense de l’environnement pour pratiques commerciales trompeuses. Elle risque de devenir la toute première entreprise condamnée en France pour greenwashing.
Les cibles prioritaires de ces techniques sont avant tout les dirigeants politiques et toute personne ayant la possibilité de transposer des informations sur le climat et l’environnement en actions concrètes.
Mais les populations en général sont aussi concernées : "Si nous ne disposons pas des bonnes informations, comment allons-nous voter pour les bonnes causes et les bons hommes politiques, et comment ces derniers vont-ils traduire les preuves évidentes en actions nécessaires ?", explique au quotidien britannique The Guardian Klaus Jensen, codirecteur du rapport.